Homélie du 9 janvier 2022, par le P. Benoît Lecomte

Barbezieux - Baignes - Barret

Publié le 8 janvier 2022

Une plongée.

Tout commence par une plongée.

Déjà, 30 ans plus tôt, Dieu était « descendu du ciel » pour naitre en ce bébé déposé dans la mangeoire. « Kénose », disent les théologiens. « Anéantissement », dira Saint Paul. Descente radicale. Perte de soi-même, par amour. Tout avait commencé par une plongée dans la vie terrestre.

Les pieds dans l’eau, Jésus plonge encore. Encore plus bas. Toujours plus bas. Dans l’en-bas de l’en-bas. Pas dans une mangeoire, mais au point d’altitude le plus bas de la planète : plus de 400m sous le niveau de la mer. Plus tard, il ira encore plus bas, « aux enfers », comme le dit notre credo. Tout à l’heure, dans l’Eucharistie, il descendra en toi, en nous, en nos profondeurs, comme la Parole, à l’instant, est venue descendre en nous. Comme une plongée incessante. Les hommes passent leur temps à parler à Dieu le nez en l’air en regardant le ciel, lui ne fait que descendre. Dieu veut aller sans cesse toujours plus bas, en notre monde, en notre vie, en toi.

Dieu ne nous rencontre pas en surface, dans les apparences les m’as-tu-vu, les bienséances. Il ne se rencontre pas dans ce qui fait bien aux yeux du monde.

Il descend.

Pour rencontrer l’Homme. Tout Homme. Au plus profond de ses attentes, de ses désirs, de ses élans et de ses échecs, dans l’en-bas du silence, où il n’y a plus de mot, où les mots ne disent plus rien. Il vient rencontrer l’Homme au point de convergence de toute l’humanité, de toutes nos vies, au point le plus partagé, le plus intime, le plus universel, au lieu de communion le plus fort. Le plus cosmique aussi, l’homme se trouvant aux confins du monde visible et du monde invisible, condensé de l’univers.

C’est là, en ce point de rencontre le plus bas, que se vit et se réalise la solidarité la plus grande. Ce n’est pas forcément dans les déclarations tonitruantes, les éclats majestueux, les coups de force les plus impressionnants que la communion se fait la plus grande. Mais dans le silence d’une main d’un malade tenue en vérité, dans l’écoute compatissante qui ne demande rien en retour, dans le mystérieux décentrement de soi pour rejoindre l’autre dans sa pauvreté. N’est-ce pas quand on est « au fond du trou », comme on dit, que se nouent les plus grandes solidarités ?

Jésus descend là au jour de son baptême. En ce point le plus bas, le plus mystérieux et peut-être le plus obscure de notre humanité, pour s’en rendre solidaire, totalement.

De cette solidarité, Dieu fait un peuple. Un peuple « en attente ». Car Dieu n’oublie pas sa mission : descendre, pour sauver l’Homme de ce qui le retient loin de la vie. Non pas sauver les hommes individuellement les uns après les autres, mais les sauver solidairement – comme on ne peut vivre sans aucune solidarité humaine. En Peuple. « Il s’est donné pour nous afin de nous racheter de toutes nos fautes, et de nous purifier pour faire de nous son peuple », disait la Lettre à Tite. Nous ne sommes pas des individus atomisés, chacun dans sa ligne d’eau, sans lien les uns avec les autres. Dieu fait de nous un Peuple, comme tous membres d’un seul corps.

Un corps en plongée.

En plongée dans le monde pour « faire le bien » et « porter la Bonne Nouvelle » aux nations comme jadis à Sion. Car « la grâce de Dieu s’est manifestée pour tous les hommes. » « Faire le bien » et « porter la Bonne Nouvelle » exigent, l’un comme l’autre, de plonger. De perdre de sa superbe. De vivre la « kénose », l’oubli de soi. D’accepter de descendre jusqu’en ce point où nous pouvons « renaître et être renouvelés par l’Esprit », comme nous le fait vivre notre propre baptême. Jusqu’à ce que nous devenions des vivants de la vie éternelle. De la vie divine. Pas de la vie étriquée, asthmatique, centrée sur elle-même, mais de la vie déployée, au Souffle de l’Esprit qui donne des ailes pour aimer en actes et en vérité.

« Toi, tu es mon Fils bien-aimé ; en toi, je trouve ma joie. » La Parole de Dieu descend sur Jésus, le désignant comme Christ. Et nous sommes, aujourd’hui, le Corps du Christ vivant pour notre monde. Cette Parole s’adresse aujourd’hui à nous comme elle s’est adressée à Jésus en son temps. Nous sommes, en Eglise, le Corps du Fils bien aimé en qui le Père trouve sa joie, envoyé dans le monde pour manifester cet amour, pour le rendre présent, palpable, sensible. Pour révéler l’amour de Dieu pour chacun, à la suite de Jésus-Christ venu plonger en notre vie humaine.

Le ciel s’est ouvert. Nous devenons « héritiers de la vie éternelle », dit Saint Paul. Un monde nouveau est déjà là, qu’il nous reste à accueillir et à faire émerger pour toute l’humanité et toute la création. Encouragement divin, ce matin, à vivre joyeusement notre mission de disciples de Jésus, d’amis de tout homme et de toute femme, de fraternité universelle.

Amen.

P. Benoît Lecomte

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