Quelles sont nombreuses, les divisions qui fractionnent notre pays, notre monde, notre Eglise, nos familles parfois ! Il y a les pro vaccin et les anti, les pro obligation et les anti, les pour contre les contres et quelques indécis qui ne savent plus sur quel pied danser. Il y a les logiques de comparaison jusqu’à la concurrence. Il y a toutes les sensibilités spirituelles, les tradis et les charismatiques, les progressistes et les libéraux, ceux de droite et ceux de gauche – et aussi les indécis qui ne savent pas sur quel pied danser. Il y a les gens en bonne santé et les malades, les bourgeois et les pauvres, les installés et les migrants, les travailleurs et les chômeurs, ceux qui prétendent à une retraite et ceux qui ne peuvent pas, les vieux et les jeunes, les chrétiens et les non chrétiens, les cathos et les non cathos… les juifs et les païens.
Et alors que chacun de nous peut se situer dans telle ou telle case, dans tel ou tel catégorie, dans telle ou telle famille, et participer, consciemment ou inconsciemment, aux séparations, aux divisions ou aux fractures de notre temps, cette phrase de Saint Paul résonne étrangement à nos oreilles : « des deux, le Juif et le païen, le Christ a fait une seule réalité ; par sa chair crucifiée, il a détruit ce qui les séparait, le mur de la haine […] A partir des deux, le Juif et le païen, il a voulu créer en lui un seul Homme nouveau en faisant la paix, et réconcilier avec Dieu les uns et les autres en un seul corps par le moyen de la croix ; en sa personne, il a tué la haine. » « Des deux, il a fait une seule réalité. » Du pro vaccin et de l’anti, du bourgeois et du pauvre, du gauchiste et du droitisant, du libéral et du tradi, il a fait une seule réalité, réconciliant tout en sa Personne. « Je rassemblerai moi-même le reste de mes brebis de tous les pays », annonçait déjà Dieu par la bouche de Jérémie. Unification. Réunification. Rassemblement de tous autour de Lui. « Les apôtres se réunirent auprès de Jésus », raconte l’évangile après le temps de leur première mission, pour « se mettre à l’écart, se reposer un peu », le retrouver, Lui, le maître, et peut-être se retrouver, eux, ensemble, dans leurs incroyables différences d’expériences, d’histoires et de caractères.
Là est la véritable action du Pasteur. Là est peut-être la véritable action et le véritable défi de tout responsable politique, religieux, associatif : faire cesser les divisions pour susciter un élan d’unité, une unité qui donne élan de vie.
Mystère de communion à laquelle Dieu nous convoque de toute éternité, depuis qu’il nous a fait à son image, à l’image des relations Trinitaires. Mystère de l’action de Dieu qui ne cesse de guider l’humanité à cette unité jusqu’à ce que se donne à voir l’Homme nouveau, l’Homme réconcilié, l’humanité réconciliée où chacun prend sa place dans la lumière de tous les autres. Mystère de la Croix du Christ qui vient réaliser cette unité, mystère de l’Esprit Saint qui veut nous apprendre chaque jour à accueillir cette réconciliation et cette paix entre nous tous.
Car là est l’un des enjeux de notre vie chrétienne et humaine. L’action du Pasteur n’est pas uniquement celle du Pasteur, elle est celle de tout le Peuple de Dieu et de toutes celles et tous ceux qui, par leur baptême, prennent part à cette mission. Il ne nous suffit pas de contempler amoureusement le Bon Pasteur et de rendre grâce pour son action, il nous faut aussi, dans l’accueil de cette action, participer à son projet, comme les apôtres ont vécu un temps de mission avant de se retrouver.
Cette participation à la réconciliation et à la paix appelle d’abord une attitude d’accueil. Du Juif comme du païen. Du pro comme de l’anti. De celui qui est fort comme de celui qui a peur. Il y a là un enjeu spirituel mais aussi sociétal. Dans des temps de vie politique ecclésiale et sociale toujours plus accélérés, ne participons pas à l’élargissement des fractures et des divisions, mais soyons des accueillants de tous, au nom de ce que l’autre est porteur d’une vérité qui me manque (P. Claverie). Et avec l’accueil, vivons l’hospitalité. Non seulement l’accueil par l’écoute, mais aussi l’accueil par le partage fraternel, cette hospitalité de l’autre, de celui qui n’est pas comme moi et qui ne pense pas comme moi, cette hospitalité qui a permis à Abraham de recevoir chez lui des anges !
Depuis l’Incarnation et l’Ascension, l’Evangile ne nous invite pas tant à regarder là haut dans le ciel qu’à hauteur de notre horizon relationnel, pour y découvrir la beauté de ce qui nous attend et de Celui qui nous y attend. « C’est lui, le Christ, qui est notre paix » et qui nous ouvre à la Bonne Nouvelle de sa paix pour tous, « pour vous qui étiez loin, pour ceux qui étaient proches. »
Profitons encore de ce temps d’été, de vacances, de retrouvailles, de lectures, de découvertes et de rencontres pour vivre l’accueil et l’hospitalité qui ouvrent l’humanité et tout homme à une nouvelle espérance, qui ouvrent à la paix et au repos du cœur. Et participer, avec le Bon Berger, à la réalisation de son projet de rassemblement et de communion, ce projet qui veut notre bonheur.
Amen.
P. Benoît Lecomte
Une réponse sur « Homélie du 18 juillet 2021 par le P. Benoît Lecomte »
[…] qui se termine ce soir ! Voici quelques nouvelles de notre vie communautaire paroissiale.– Ici, vous trouverez l’homélie du Père Benoît, donnée ce matin à […]