Homélie du 12 mai 2024, par le P. Maxime Petit

Montmoreau - Blanzac - Villebois-Lavalette

Publié le 12 mai 2024

Chers frères et sœurs,

Je ne sais pas si vous l’avez noté comme moi en écoutant la Parole de Dieu, mais la liturgie de ce dimanche ne ressemble à aucune autre. Evidemment, nous sommes encore dans le temps pascal et l’Eglise nous donne d’approfondir encore notre compréhension de la Résurrection. Mais nous sentons bien que depuis dimanche dernier quelque chose a changé. L’Ascension du Seigneur étant passée par là, notre regard n’est plus uniquement tourné vers le tombeau vide. Il n’est pas non plus tourné vers le ciel puisque l’évangile de jeudi nous demandait de ne pas rester figés dans cette attitude. Aujourd’hui, nous sommes invités à regarder notre vie présente, en prenant acte de ce qui s’est passé à l’Ascension. J’en veux pour preuve la collecte qui ouvrait notre célébration : « Seigneur, nous croyons que le Sauveur du genre humain est auprès de toi dans la gloire, puissions-nous éprouver qu’il DEMEURE AVEC NOUS jusqu’à la fin du monde ».

Pour entrer dans le quotidien de cette vie présente, la liturgie nous fait entendre un extrait du chapitre 17 de l’évangile de Jean. Dans cette grande prière, Jésus s’adresse directement à son Père à haute voix. Ce qui permet à ceux qui l’entourent d’entrer dans l’intimité de sa relation avec lui et de découvrir en même temps ce qui préoccupe Jésus à quelques heures de sa Passion. Il est fascinant de découvrir que Jésus, alors qu’il sait très bien qu’il va être livré aux mains des hommes, ne prie pas pour lui-même. Il prie pour ses disciples avec des mots ciselés : « Père saint, garde mes disciples unis dans ton nom, le nom que tu m’as donné, pour qu’ils soient UN, comme nous-mêmes ».

Reconnaissons-le, cette demande de Jésus est très audacieuse, presque déraisonnable ! Car l’unité du Père et du Fils n’est pas une unité de surface. C’est une unité profonde, solide, que nous exprimons dans le Credo en professant que le Fils est consubstantiel au Père. Comment Jésus ose-t-il demander que l’unité des disciples soit du même acabit ? Peut-on vraiment croire que ceux-ci sont appelés à vivre une unité du même ordre ? Peuvent-ils être « un » comme le Père et le Fils sont « un » ? Je crois que cette série de questions mérite que nous nous arrêtions un instant car elle porte le mystère de la vocation chrétienne qui semble être le thème majeur de ce septième dimanche de Pâques.

Au seuil de la Passion, alors qu’il va livrer sa vie par amour pour ses disciples, Jésus ne va plus pouvoir les enseigner par sa simple présence. Jusqu’ici, il était à leurs côtés, mais maintenant qu’il « retourne vers son Père », il ne va plus pouvoir assurer cette mission d’unité, de communion. Il prie donc son Père pour initier une nouvelle relation avec les disciples, et pour favoriser l’unité de l’Eglise qui va naître. C’est bien là, chers frères et sœurs, notre condition comme chrétiens dans le monde. Jésus n’est plus au milieu de nous comme il l’a été pendant sa vie terrestre, nous sommes donc appelés à vivre cette vie à l’intérieur de l’unité divine, en prenant pour modèle l’unité du Père et du Fils.

Evidemment, Jésus étant Dieu, nous ne pourrons jamais prétendre à une unité de même nature. Même au ciel, nous ne prendrons jamais la place du Fils unique… Cependant, parce que Jésus le demande si clairement, nous devons croire que nous sommes appelés nous aussi à vivre plus qu’une unité de surface. Comment ? En devenant participants de l’unité même de Dieu. Et pour nous aider à le comprendre, je crois que la suite de l’évangile de ce jour nous donne des pistes précieuses.

          La première, c’est de se laisser conduire par lui. « J’ai veillé sur eux, dit-il à son Père, et aucun ne s’est perdu sauf celui qui va à sa perte ». Ce qu’il faut retenir là, me semble-t-il, c’est que les hommes sont incapables d’atteindre l’unité à laquelle ils sont appelés par leurs propres forces. Il faut que Jésus soit l’unificateur du genre humain. Or, c’est précisément ce qu’il a fait en venant dans le monde dans son Incarnation. Comme le rappelle la formule bien connue des Pères grecs : notre Dieu s’est fait homme pour que l’homme soit Dieu. En venant dans le monde, le Fils s’est profondément uni à l’homme pour le sauver, c’est-à-dire pour l’introduire dans sa communion d’amour, dans sa propre relation avec le Père et l’Esprit Saint. Donc, pour vivre de cette « unité » du Père et du Fils, notre premier acte est donc de nous laisser faire, d’accepter de nous laisser rejoindre par Dieu… Ce qui n’est évidemment pas si facile.

          Deuxième piste dans cet évangile, c’est de nous mettre à l’écoute de la Parole. Jésus dit en effet : « moi, je leur ai donné ta Parole, et le monde les a pris en haine parce qu’ils n’appartiennent pas au monde, comme moi je n’appartiens pas au monde ». La Parole de Dieu est tranchante comme le glaive, elle brûle à l’intérieur des croyants pour qu’ils puissent poser des choix qui engagent toute leur existence. C’est certainement pour cela que le monde a de la haine envers eux, parce que leur vie n’est désormais plus centrée sur lui, mais sur le message qu’ils ont reçu de la bouche même de Dieu. Ainsi, comme le dévoile Jésus, les disciples n’appartiennent plus au monde, non parce qu’ils seraient différents des autres, mais parce qu’ils se sont laissé saisir par la Parole, la Parole faite chair, afin d’être transformés par elle.

          Enfin, troisième piste, les disciples peuvent vivre l’unité même de Dieu parce qu’ils sont « sanctifiés dans la vérité ». Là encore, comme dans la première piste, il s’agit avant tout de laisser à Dieu le gouvernail. Mais ce que cette dernière piste apporte de nouveau, c’est que cette sanctification n’est pas d’abord pour eux-mêmes, son but est de se répandre dans le monde. Jésus poursuit en effet : « de même que tu m’as envoyé dans le monde, moi aussi, je les ai envoyés dans le monde ». Cela nous enseigne une chose essentielle : l’unité des disciples, si elle prend pour modèle l’unité

de Dieu, ne peut jamais être close sur elle-même ! Car l’unité de Dieu est fondamentalement ouverte sur l’extérieur. A la manière de Jésus qui, en venant dans le monde, est resté en communion d’amour avec le Père et le Saint Esprit.

          Ainsi, chers frères et sœurs, l’unité dans laquelle Jésus veut faire entrer ses disciples dans l’évangile de ce jour apparaît tout entière être une unité DYNAMIQUE. Elle trouve son fondement dans le mouvement de l’Incarnation. Elle est une écoute de la Parole qui tranche avec la vie du monde. Et enfin, elle est appelée sans cesse à s’ouvrir à ce monde que le Fils est venu sauver. Entrer dans l’unité du Père et du Fils, ce n’est donc pas contempler Dieu d’une manière statique, en admirant son unité de l’extérieur. Mais c’est participer au mouvement même de Dieu qui sort de lui-même pour faire entrer ce monde dans son unité.

          Eh bien, chers frères et sœurs, alors que nous nous préparons à recevoir l’Esprit à la Pentecôte, nous sommes invités à entrer dans CETTE unité-là. Alors prions ! Prions pour que chacun des membres de notre communauté se sente appelé à sortir de lui-même pour annoncer la Bonne nouvelle du salut. Prions aussi pour le monde parfois hostile, accueille cette Bonne nouvelle. Que l’Esprit de la Pentecôte nous précède pour l’embraser de l’unité divine, pour que qu’elle se répande à toute l’humanité divinisée par le Christ Ressuscité. Amen.

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