Homélie pour l’Ascension, par le P. Maxime Petit

Barbezieux - Baignes - Barret

Publié le 12 mai 2024

« Galiléens, pourquoi restez-vous là à regarder le ciel ? » Cette question posée par deux hommes en blanc juste après que Jésus fut enlevé au ciel, je voudrais vous la posez à vous aussi, chers frères et sœurs, en ce jour où nous célébrons l’Ascension : « Barbeziliens, Baignois, Barretois, Lagardais, Berneuillais, Vignollais, pourquoi restez-vous là à regarder le ciel ? »

          Cette question a de quoi nous intriguer, voire nous déstabiliser… Notamment parce que pendant 40 jours, on n’a cessé d’entendre un extrait de l’épître aux Colossiens qui, à première vue, semble dire le contraire. Saint Paul écrit en effet aux habitants de Colosse : « frères, recherchez les réalités d’en haut : c’est là qu’est le Christ, assis à la droite de Dieu ». Alors, faut-il regarder le ciel ? ou ne pas le regarder ? Il faut savoir à la fin !

          Eh bien je crois, chers frères et sœurs, que la réponse à cette question dépend de la manière dont on le regarde. Car il y a une bonne et une mauvaise manière de le regarder, ce ciel.

          La mauvaise manière, à mon avis, c’est celle qui consiste à considérer Dieu comme un être qui ne serait qu’au-dessus. Une sorte de démiurge tout-puissant qui entrerait en relation avec nous d’une manière purement extérieure. Dans ce cadre, continuer à regarder le ciel après l’Ascension du Seigneur, c’est considérer que la vie terrestre de Jésus n’a été qu’un temps de grâce où Dieu est descendu un moment de son piédestal pour nous sauver du péché ; une parenthèse enchantée où Dieu est venu revêtir l’homme de sa divinité mais sans s’engager personnellement pour l’éternité. Au fond, il est reparti comme il est venu, à la manière de Marie Poppins qui pointe le bout de son nez pour régler une situation avant de s’envoler comme elle est venue. Penser ainsi, c’est croire que Jésus a vécu un temps la vie de l’homme, mais maintenant qu’il est parti, tout est redevenu comme avant. Si on veut lui demander quelque chose, il suffit de lever les yeux vers le ciel et d’espérer qu’il va nous répondre, maintenant qu’il connaît un peu mieux notre condition d’homme.

          Cette compréhension du mystère de l’Incarnation, chers frères et sœurs, n’est pas totalement fausse. Dieu est Dieu et l’homme est l’homme. Et il est bien vrai que dans le mystère de l’Ascension, Jésus se soustrait à notre regard pour retrouver sa place originelle. Mais je crois que cette manière de comprendre le mystère de l’Ascension est vraiment insuffisante. Car Jésus ne remonte pas vers son Père comme il en est descendu ! S’il a pris sur lui notre humanité, ce n’est pas seulement pour un moment, mais pour l’éternité. Après son Incarnation dans le sein de Marie, après son Ascension à la droite du Père, Jésus demeure un homme. Sa divinité n’a pas changé, son lien au Père et à l’Esprit dans l’éternelle communion d’amour est la même. Mais désormais, le Verbe de Dieu, le Fils du Père, est Jésus, l’homme qui a grandi à Nazareth, qui a parcouru les routes pour enseigner la Bonne nouvelle, qui a donné sa vie sur le bois de la Croix, qui est ressuscité d’entre les morts avant d’apparaître à ses disciples pendant 40 jours. Cette vie terrestre de Jésus est tout sauf une parenthèse ! Elle est le renouvellement de l’univers entier, une transformation qui atteint les profondeurs de la création renouvelée de l’intérieur, et cela jusqu’à ce qu’il revienne dans la gloire. C’est, je crois, le sens de la phrase qui suit dans les Actes : « Galiléens, pourquoi restez-vous là à regarder le ciel ? Ce Jésus, qui a été enlevé au ciel d’auprès de vous, viendra de la même manière que vous l’avez vu s’en aller vers le ciel ». Le Fils ne sort pas indemne de son Incarnation. Il reviendra dans la gloire, chargé de cette humanité, celle qu’il a assumée pour toujours.

          Une telle compréhension teinte nécessairement notre manière de « rechercher les réalités d’en haut » pour reprendre l’expression de saint Paul. La montée du Christ au ciel pour s’assoir à la droite du Père est tout sauf un départ de la terre. C’est au contraire l’expression d’une nouvelle présence au monde, certainement moins visible puisque le Christ est soustrait à nos yeux par la nuée. Mais cette invisibilité charnelle ne veut pas dire irréalité. Bien au contraire, cette nouvelle présence de Jésus est même peut-être plus profonde parce que plus intérieure. Comme le dit paisiblement saint Marc au terme de son évangile, juste après l’Ascension : « le Seigneur travaillait avec eux et confirmait la Parole par les signes qui l’accompagnaient ».

          Evidemment, désormais, on ne peut plus prendre le Seigneur dans ses bras, on ne peut plus mettre le doigt dans son côté. Mais on a la chance de le savoir présent au plus profond de notre cœur, à chaque lecture de la Parole de Dieu, dans chacune de nos rencontres et surtout dans l’Eucharistie qui fait mémoire de son sacrifice par amour pour chacun d’entre nous. Par les yeux de la foi, nous savons que le Christ qui siège à la droite du Père n’est pas absent de notre monde. Il lui est plus que jamais présent, intimement présent.

          Alors chers frères et sœurs, en ce jour où nous célébrons l’Ascension, ne restons pas bouche bée en regardant le ciel qui nous paraît bien vide. Regardons ce monde, cette terre, avec un regard de foi. Approfondissons notre relation au Christ Ressuscité dans la prière pour apprendre à le reconnaître dans chaque être de la création. Et surtout, demandons-lui de nous envoyer son Esprit Saint pour qu’il fasse de nous les évangélisateurs dont ce monde a besoin. Comme les apôtres, allons joyeusement dans les moindres recoins de notre belle Charente pour proclamer que le Seigneur Ressuscité nous a sauvés et surtout qu’il habite aux profondeurs de ce monde qu’il aime tant. Amen.

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