(Evangile : Luc 24, 33-45)
« Dans leur joie, ils n’osaient pas encore y croire, et restaient saisis d’étonnement. » Nous sommes après la résurrection de Jésus. Le tombeau a été trouvé vide. Jésus est apparu à Marie-Madeleine le matin même, et le soir il a fait route avec deux disciples vers le village d’Emmaüs, où il s’est laissé reconnaître à la fraction du pain. Ces deux disciples courent à Jérusalem, où ils trouvent les apôtres et leurs compagnons, pour leur raconter ce qui vient de leur arriver : ils ont vu Jésus. Et ils parlent encore quand Jésus arrive au milieu d’eux, venant d’on ne sait où. Il est là, présent. Il parle avec eux, mange du poisson, montre ses mains et ses pieds qui portent la marque des clous. Il est bien vivant, bien qu’il passe à travers les murs, apparaisse et disparaisse instantanément. Etrange présence.
On comprend la joie des disciples. On comprend aussi leur étonnement et leur difficulté à croire. Ils sont face à un événement inouï, jamais observé. Un homme, qui était mort, est ressuscité. Et le voilà, tout à la fois présent et insaisissable.
Et 2000 ans après, nous sommes là, réunis. Avec les mêmes récits, les mêmes témoignages. L’expérience de voir Jésus et de manger avec lui, en moins. Et nous sommes convoqués à la même question : que croire ? En qui mettre notre confiance ? Faut-il, et pourquoi, mettre notre confiance en ce Jésus, qu’on n’a pas revu depuis tout ce temps ?
Jésus, même ressuscité, ne s’impose pas. Sa résurrection n’est pas une évidence à laquelle nous serions obligés d’adhérer parce qu’il n’y aurait aucun doute. Il s’offre, toujours. A notre liberté. A notre décision. Il demande à chacun de nous, intérieurement : « M’aimes-tu ? Veux-tu mettre ta confiance en moi ? »
On aurait pu imaginer qu’il en impose, et qu’il s’impose. Que devant sa puissance, nous n’ayons pas le choix. Mais sa puissance n’est pas écrasement, aveuglement, elle est amour et liberté. Elle est puissance de relèvement pour celui qui veux l’accueillir en sa vie.
Cette puissance de relèvement, que l’on appelle aussi « résurrection », vous y avez plongé, lorsque vous étiez bébé. Vos parents, et ceux qu’ils ont choisi pour être vos parrains et marraines, vous ont présentés à l’Eglise et ont demandé à ce que vous soyez marqués, à tout jamais, par la vie de Dieu en vous. Vous avez plongé dans l’eau du baptême qui nous fait vivre en enfants de Lumière, en fils et en filles de Dieu, en frères et sœurs de Jésus-Christ. Vous n’aviez pas encore la parole. Mais vous avez grandi. Votre cœur, votre intelligence se sont ouverts, et vous avez pris la route. Celle qu’on vous indiquait, souvent : celle que vos parents vous ont montré, celle de la foi, de cette confiance aussi belle qu’étrange, qui nous saisit alors qu’elle reste insaisissable pour nous. Et aujourd’hui, vous prenez la parole. Pour faire vôtre, cette foi de l’Eglise que vous avez découverte et dont vous vivez intérieurement et mystérieusement. Tout à l’heure, personne ne vous prendra dans ses bras pour vous porter au-dessus de la cuve baptismale : c’est vous qui viendrez, librement. Qui avancerez avec confiance vers cette eau qui fait vivre de Dieu, pour y replonger. Pas seulement la main, mais avec la main, tout le corps, et toute votre existence. Peut-être avec « joie et étonnement », comme les disciples dans l’Evangile. Et vous vous marquerez du signe de l’Amour infini, de la vie de Dieu plus puissante que toute mort, du signe de la croix. Au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit. Dans un acte d’abandon qui ne lâche rien de votre responsabilité sur votre vie, bien au contraire. Pour être avec Lui, Jésus, et pour qu’il soit en vous, jusqu’à la fin des temps.
Quand les disciples vont mieux comprendre ce qui s’est passé, un peu plus tard dans l’Evangile et dans les débuts de l’histoire de l’Eglise, nous allons les voir partir dans toutes les directions, la joie au cœur, le désir vif de partager la nouvelle de la résurrection de Jésus, de faire connaître son nom à toute la terre. Ils vont continuer à s’attacher à lui, non plus en marchant avec lui sur les chemins de Palestine, mais dans la prière, le silence et la méditation de sa Parole. Leur vie va en être transformée : libérés de toute autre loi, ils n’auront plus qu’une seule loi, celle de l’Amour, inspirée par l’Esprit Saint, l’Esprit du Christ.
Vous qui faites ce soir votre profession de foi, continuez de grandir dans la foi, de l’approfondir, de vous nourrir par la prière, le service, les sacrements, la vie en Eglise. Que le renouvellement des promesses de votre baptême, vécu ce week-end, soit aussi pour vous comme une étape qui vous donne la joie de vivre et de témoigner de notre foi en Jésus Christ, mort et ressuscité. Le monde autour de nous, et parfois très proche de nous, a besoin de cette joie qui nous tourne les uns vers les autres, qui nous fait préférer le bien des autres à notre égoïsme personnel, qui ouvre une espérance là où il est facile de désespérer.
Entrez dans la joie de croire, non pas sans jamais aucun doute, car il fait partie de la foi, mais dans la liberté de la confiance au Dieu de Jésus Christ, qui ne cesse de faire toute chose nouvelle, et qui vous adresse cette Parole de l’Evangile, chaque jour de votre vie : « La paix soit avec vous ! »
Amen.
P. Benoît Lecomte
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