Nous célébrons aujourd’hui en paroisse, avec quelques jours d’avance sur le calendrier officiel, la journée mondiale des malades. Et parmi nous, plusieurs vont recevoir, dans quelques instants, le sacrement des malades, l’onction des malades. Et la Parole de Dieu vient nous retrouver, encore une fois, précisément où nous sommes. Ecoutons Job : « La vie de l’homme sur la terre est une corvée… depuis des mois je n’ai en partage que le néant, je ne compte que des nuits de souffrance. A peine couché, je me dis : « Quand pourrai-je me lever ? » Le soir n’en finit pas. Ma vie n’est qu’un souffle, mes yeux ne verront plus le bonheur. » Comment ne pas entendre, dans ces mots, les mots et les pensées, les soupirs de ceux qui souffrent dans le corps ou dans leur esprit ? Comment ne pas reconnaître ces pensées de ceux qui sont fatigués, épuisés par l’attente d’un examen, d’un soin, d’un traitement, d’une meilleure santé ? Comment ne pas ressentir le cris qui monte de tous les lieux de notre planète atteinte par cette pandémie qui n’épargne personne et nous fait toucher d’aussi près que jamais la beauté de la santé et la fragilité de nos corps et de nos vies ? Oui, Seigneur, avec tous ceux qui souffrent, nos lèvres reprennent les mots de Job « Quand cela cessera-t-il, ne verrons-nous plus jamais le bonheur ? D’ailleurs, Seigneur, es-tu encore là ? Entends-tu nos plaintes et nos prières ? Ne feras-tu donc rien pour notre bonheur ? »
L’Evangile est comme une réponse de Dieu à nos pensées. « Aussitôt, on parla à Jésus de la malade. Jésus s’approcha, la saisit par la main et la fit lever. La fièvre la quitta, et elle les servait. » Le Seigneur n’est pas sourd à notre appel et à nos supplications. Il est là, il s’approche, il vient à nous et nous relève. Oh, bien sûr, tous les malades ne se relèvent pas aussi facilement et aussi rapidement que la belle-mère de Simon-Pierre ! Mais ce récit nous raconte comment Dieu non seulement ne nous abandonne pas, mais plus encore, prend soin de nous. Il est le Dieu de la Vie. Il est le Dieu qui ne prend pas de plaisir à nos souffrances et à nos maladies. Il n’est pas un grand sorcier, un chirurgien magicien ou je ne sais quel ensorceleur qui guérirait tout le monde par magie, même si la suite de l’évangile pourrait nous y faire penser. « Les guérisons accomplies par Jésus ne sont jamais des gestes magiques, mais toujours le fruit d’une rencontre, d’une relation interpersonnelle où, au don de Dieu offert par Jésus, correspond la foi de celui qui l’accueille, comme le résume bien la parole que Jésus répète souvent : « Ta foi t’a sauvé » » (Message du pape pour la 29è journée mondiale du malade). Il est celui qui est à l’écoute de chacun et prend soin de chacun. Au point que nous tous, nous pouvons l’implorer et lui demander de nous accompagner et de se pencher sur nous.
« Il guérit les cœurs brisés et soigne leurs blessures », chantait le psaume. Le domaine du Seigneur n’est pas la virologie ou la kiné, la cardiologie ou la cancérologie ou je ne sais quelle spécialité. Le domaine du Seigneur, c’est l’amour. L’amour qui peut tout. L’amour qui guérit. L’amour qui apaise. L’amour qui réchauffe. L’amour qui fait vivre, et vivre malgré les difficultés sanitaires ou médicales ou de vieillesse ou de santé. L’amour qui dépasse tous les maux. L’amour qui dépose un baume sur celui qui a besoin.
Ce baume, c’est l’onction d’huile que vous allez recevoir. Elle n’est pas un traitement miraculeux à vos épreuves, elle est le signe de la tendresse et de la proximité de Dieu pour chacun de vous. Elle est une caresse de Dieu sur vous, dans votre épreuve, dans votre faiblesse. « Avec les faibles, j’ai été faible », disait Saint Paul. S’il peut dire cela, c’est qu’il en a trouvé le modèle dans le Christ Jésus, qui s’est fait faible et a accepté de prendre sur lui toutes nos faiblesses, toutes nos fatigues, nos désespérances, toutes nos douleurs. « L’expérience de la maladie nous fait sentir notre vulnérabilité et, en même temps, le besoin inné de l’autre. Notre condition de créature devient encore plus claire et nous faisons l’expérience, d’une manière évidente, de notre dépendance de Dieu. Quand nous sommes malades, en effet, l’incertitude, la crainte, et parfois même le désarroi, envahissent notre esprit et notre cœur ; nous nous trouvons dans une situation d’impuissance car notre santé ne dépend pas de nos capacités » (Message du pape pour la 29è journée du malade). Alors dans la simplicité de cette onction, se déploie la puissance d’amour du Christ, sa chaleur et sa vie.
Vous avez accepté de vivre ce sacrement en Eglise, en communauté rassemblée ce dimanche. Aussi, vous devenez pour nous tous signes de ce que nous devons accepter d’être, de recevoir et de devenir. Accepter notre faiblesse, et non pas chercher sans cesse à les cacher ou à les dépasser, accepter de recevoir cette tendresse de Dieu en nous, sans nous barricader ou nous emmurer dans nos illusions de puissance, et accepter de devenir à notre tour des baumes de soin pour notre monde et pour tous ceux qui nous entourent et qui souffrent. « La proximité est un baume précieux qui apporte soutient et consolation à ceux qui souffrent dans la maladie. En tant que chrétiens, nous vivons la proximité comme expression de l’amour de Jésus-Christ, le bon Samaritain qui, avec compassion, s’est fait le prochain de chaque être humain, blessé par le péché. Unis à lui par l’action de l’Esprit Saint, nous sommes appelés à être miséricordieux comme le Père et à aimer en particulier nos frères malades, faibles et souffrants (cf. Jn 13, 34-35). Et nous vivons cette proximité, non seulement personnellement, mais aussi sous forme communautaire : en effet, l’amour fraternel dans le Christ engendre une communauté capable de guérison qui n’abandonne personne, qui inclut et accueille, surtout les plus fragiles » (idem).
Nous prions pour vous, qui vivez ce matin le sacrement des malades. Nous prions pour tous ceux qui souffrent et qui ne connaissent peut-être pas la tendresse de Dieu auprès d’eux. Nous prions pour tous les soignants dont le métier est d’être au service de ceux qui souffrent et d’apaiser et soigner ces douleurs. Nous prions pour notre communauté et notre Eglise, pour que nous devenions ensemble comme une caresse de Dieu pour ceux que nous croisons, et pour notre monde.
Amen.
P. Benoît Lecomte
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