Dimanche de la santé – Onction des malades
Dieu appelle. C’est ce que nous entendons aujourd’hui à longueur de textes. Dieu appelle pour faire Alliance, il appelle pour marcher avec lui à sa suite, il appelle pour être témoin de son amour dans le monde, il appelle pour proclamer la Bonne Nouvelle, il appelle pour devenir « pêcheurs d’hommes. » Dieu appelle Isaïe, les apôtres, et Paul. Il appelle dans l’Ancien Testament, dans l’évangile et encore après, dans le temps de l’Eglise. Dieu appelle de tous temps, et encore aujourd’hui. Ici même, au milieu de nous. Il appelle des hommes dans les récits de ce jour, mais des femmes aussi.
On peut vite avoir la tentation de mettre sur un piédestal ceux qui répondent à son appel, surtout si la mission qu’ils exercent est une mission visible et hiérarchique dans l’Eglise. Les évêques, les prêtres, les diacres, les responsables, ceux qui « savent faire » sont rapidement vus comme des gens importants, qui auraient plus de sainteté que les autres.
Les récents scandales qui ont éclatés dans l’Eglise montrent la dangerosité de cette posture. L’on ne doit idéaliser personne au risque de se tromper et de tomber de haut. Mais la Parole de Dieu ce matin va plus loin.
Dieu appelle Isaïe à être prophète, alors qu’il a les lèvres impures.
Dieu appelle Paul à être apôtre, alors qu’il a persécuté l’Eglise.
Jésus appelle Simon et quelques autres à le suivre, alors qu’ils ne sont que des pêcheurs et que leur pêche est inefficace.
Dieu ne regarde pas aux compétences et au CV, il ne semble pas appeler des hommes parfaits, taillés pour la mission attendue. Bien au contraire, il appelle des gens qui se savent fragiles, abîmés, pauvres, humiliés, indignent. « Je ne suis pas digne d’être appelé Apôtre, dit Paul. Mais ce que je suis, je le suis par la grâce de Dieu… A vrai dire, ce n’est pas moi, c’est la grâce de Dieu avec moi. » « Ma puissance se déploie dans ma faiblesse », dira-t-il ailleurs (2 Co 12, 9).
Ce dimanche est le « dimanche de la santé », à deux jours de la « journée mondiale des malades ». Ces jours ne sont pas là pour nous rappeler la présence à nos côtés de tous nos frères et sœurs malades, fragiles, âgés. Nous les côtoyons quotidiennement et avons à cœur de les rejoindre et de les accompagner, même si nous pouvons toujours progresser pour faire davantage avec et pour eux. Mais ces jours et la Parole de Dieu ce matin nous rappellent que ces frères et sœurs malades sont peut-être les premiers à être appelés par le Seigneur, pour prendre leur part dans la mission, dans le témoignage, dans l’annonce de l’Evangile, dans la transmission du trésor dont nous sommes dépositaires, dans l’Alliance que Dieu veut nouer avec nous. Ils sont les premiers, parce que leur fragilité, leur maladie, leur blessure, est précisément le lieu par lequel Dieu transmet toute sa puissance, qui n’est que puissance d’Amour et de tendresse.
Le sacrement des malades, l’onction d’huile des malades vécue ce dimanche au cours de cette eucharistie et dans tant de paroisses, ne dit pas autre chose : « Désormais, la puissance de Dieu agit dans votre faiblesse. » Célébrer ce sacrement si intime au milieu du rassemblement dominical rappelle que tous, absolument tous, nous sommes appelés par le Seigneur à prendre notre part de la mission, quelques soient nos capacités physiques, intellectuelles, notre entrainement spirituel.
Le corps du Seigneur est un corps abîmé, troué, martyrisé, partagé, rompu. C’est le Corps de l’Eglise tout entier qui est aussi ainsi, pour que jamais il ne s’enorgueillisse de sa propre force. Et les malades au milieu de nous nous rappellent cette réalité.
Merci à vous, qui recevez au milieu de nous l’onction des malades. Vous devenez pour nous des signes de la façon avec laquelle le Seigneur nous aime, nous accompagne, nous appelle. Vous aussi, comme les pêcheurs dans l’évangile, vous mettez votre confiance dans la Parole de Jésus : « Sur ta parole, je vais jeter les filets » dit Simon. Alors que le monde n’a d’yeux que pour les puissants, les forts et les riches, vous nous rappelez où regarde le Seigneur : il regarde vers ceux qui pleurent, qui sont faibles et qui lui font confiance.
Que la grâce que vous allez recevoir rejaillisse sur nous tous, sur tout le Corps qu’est l’Eglise, et sur toute l’humanité. Pour que nous sachions accueillir notre faiblesse et que nous laissions Dieu déployer par elle toute sa puissance.
Amen.
P. Benoît Lecomte
Laisser un commentaire