Homélie du 23 juin 2024, par le P. Benoît Lecomte

Barbezieux - Baignes - Barret

Publié le 23 juin 2024

« Passons sur l’autre rive. »

Cette fin d’année pastorale est une bonne occasion pour regarder la traversée que nous avons faite ensemble, depuis le mois de septembre ! De revoir toutes les étapes, de la rentrée à la Toussaint et à Noël, du temps du carême à Pâques et la Pentecôte. De relire, comme nous avons essayé de le faire avec l’EAP et bon nombre d’équipes paroissiales, la beauté des rencontres, de la mission vécue, de rendre grâce, de demander pardon, d’appeler à l’aide aussi quand il y a besoin. De se remémorer les beaux moments traversés et aussi les coups de tempête, car il a pu y en avoir. Et de Le reconnaître présent, là, avec nous, dans notre barque, lui qui nous a envoyé travailler en son nom, lui qui nous a envoyé traverser en son nom.

« Passons sur l’autre rive. »

Vous le savez, cette semaine, jeudi pour être précis, cela fera 20 ans que l’Eglise m’a ordonné prêtre au service de la communion du Peuple de Dieu dans notre diocèse. Ce n’est, j’espère, pas tout à fait l’autre rive encore, mais l’occasion, là aussi, de se retourner et de contempler le chemin parcouru. De rendre grâce pour tout, et aussi pour la présence du Christ dans les tempêtes traversées. Ceux qui fêtent leurs 20 ans de mariage savent qu’ils ne fêtent pas 20 ans de vie sans aspérité et de calme plat, mais qu’il y a eu des orages. Il en est évidemment de même pour un prêtre. Ceux qui voudraient ne pas le voir et laisser les prêtres sur un piédestal sacralisé, ne sont pas les meilleurs compagnons. Les prêtres sont des hommes comme les autres, qui ont accepté, pour les autres, de vivre la traversée d’une façon originale mais ni plus ni moins risquée que les autres. On cherche parfois à définir ce qu’est un prêtre, encore plus dans les temps de « crise d’identité ». Peut-être le milieu du cirque, plus encore que celui de la navigation, exprime le plus juste de sa vie et de sa mission. Je ne parle pas du cirque auquel ressemblent parfois le monde ou l’Eglise dans son organisation ! Mais les prêtres sont tour à tour des clowns et des poètes qui ramènent à l’essentiel, des jongleurs, des équilibristes ne devant pas perdre leur centre de gravité, des gymnastes, des magiciens, des trapézistes… des itinérants, jamais installés, toujours en chemin… en traversée.

Célébrer 20 ans d’ordination, ce n’est donc pas célébrer un homme, ni ses capacités ! Mais rendre grâce pour tout ce qui a été donné de vivre au cours de cette traversée, pour les milliers de rencontres, de collaborations, de projets, de témoignages reçus de relèvements, de missions reçues, d’appels lancés… et aussi, et d’abord pour la fidélité de Dieu et de sa miséricorde, pour son compagnonnage tantôt doux, tantôt musclé, qui nous rattrape par le bras, parfois par les cheveux. Quand nous crions : « Maître, nous sommes perdus ! »

L’important, finalement, est d’écouter Jésus nous demander de « passer sur l’autre rive », et de nous aventurer. Car là est la vie. Il n’y a pas de vie sans traversée, pas de vie dans l’immobilisme. Là est le chemin du bonheur et de la vraie liberté. Et quel bonheur de voir comment notre paroisse vit ! Parce que nous sommes lancés ensemble dans l’aventure de l’Evangile, avec ses joies et ses temps de rudesse, avec ses élans et sa radicalité. Parce que nous nous laissons façonner, transformer, questionner par l’Evangile et par les autres. Il n’est de vie qu’en passant sur l’autre rive. Dans la confiance en Jésus.

Jésus, le Christ, a fait la grande traversée le premier. « Il est mort pour tous, afin que les vivants n’aient plus leur vie centrée sur eux-mêmes, mais sur lui, qui est mort et ressuscité pour eux », rappelle Saint Paul. Il monte dans notre barque pour, en fait, nous emmener avec lui dans la mort de toute mort et nous faire traverser cette mort, pour que nous devenions « une créature nouvelle », vivants d’une liberté nouvelle. Une vie où « nous ne regardons plus personne d’une manière simplement humaine. » Une vie qui annonce déjà un monde nouveau. Un monde fraternel. Un monde où « les puissants sont renversés de leur trône, et les humbles sont élevés, où les affamés sont comblés de biens et les riches repartent les mains vides » (Lc 1). Traversée des traversées, qui fait mourir pour vivre. Ainsi en est-il de toute traversée à la suite du Christ. Ce n’est pas toujours de tout repos, ni dans la vie de l’Eglise ni dans nos vies personnelles. Les disciples dans la barque en font l’expérience. Mais le Maître est là, et nous pouvons mettre notre confiance et notre foi en Lui.

Nous pourrions, d’ailleurs, être jaloux des disciples : ils ont un problème, et Jésus le résout d’une parole. Nous avons, souvent, des problèmes, et Jésus semble rester dans son sommeil, à ne rien faire ! De quel droit serions-nous privés de miracle ? C’est que le récit d’Evangile ne nous raconte pas la solution, il nous révèle le signe. Ce qui est efficace, c’est de s’accrocher à Jésus de toutes nos forces, non pour supprimer l’épreuve, mais pour la traverser. Pour continuer l’aventure. Et vivre.

« Passons sur l’autre rive. » Le pluriel nous engage tous : toi, moi, nous, et Lui aussi, avec nous. Il nous engage dans une solidarité humaine et divine totale. Il nous prend et nous saisit, comme on peut l’être dans ce qu’on appelle une vocation. Et c’est en Peuple, en Eglise, les uns avec les autres, et aussi chacun les uns pour les autres, dans nos complémentarités et nos différences, dans l’unité que Christ a réalisée, que nous passons et traversons les tempêtes dans la foi et la confiance. Sans jamais mettre la main sur lui : « Qui est-il donc ? » Mystérieusement toujours présent.

Sa Parole est efficace, sa présence indéfectible jusque dans les tempêtes, son invitation à partir à l’aventure nous mets en vie. Au seuil de cette année, rendons grâce à Dieu. Présentons-lui nos cris d’angoisse et nos chants de joie, entendons à nouveau frais son appel à nous lever, et laissons-le nous donner sa vie, nous ressusciter avec Lui.

Amen.                                                                                              

P. Benoît Lecomte

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