Homélie du 22 octobre 2023, par le P. Benoît Lecomte

Barbezieux - Baignes - Barret

Publié le 22 octobre 2023

« Les pharisiens allèrent tenir conseil pour prendre Jésus au piège. » Voilà le but de la manœuvre, l’objectif affiché des pharisiens : tendre un piège à Jésus. L’affaire est simple. En lui posant la question de l’impôt : soit il répond « non », et il est un opposant au pouvoir qu’il va falloir éliminer, soit il répond « oui » et il perd toute crédibilité, son discours devient creux, plus rien n’est nouveau, les disciples sont soumis eux aussi à l’empereur. C’est simple, implacable : blanc ou noir et dans tous les cas, il est mis hors d’état de nuire.

Cette situation ne nous est peut-être pas totalement étrangère. Il me semble que nous sommes nous aussi bien souvent pris dans bien des pièges. Il faudra être pour ou contre, la nuance n’a pas lieu d’être. L’esprit du monde n’apprécie pas l’entre deux, voire le soupçonne. Alors, pro ou anti Israélien ? Pro ou anti Palestinien ? Pour ou contre le gouvernement, ou tel ou tel parti politique ? Pour ou contre telle ou telle loi, groupe, intérêt ? Pour le pape, le curé, l’évêque, ou contre lui ? Progressiste ou conservateur ? Contemplatif ou actif ? C’est bien ou c’est mal. Il nous faut choisir. Et pas l’entre-deux. On le mesure encore avec nos domaines de compétences ou d’intérêts. Chacun creuse son sillon, mais qu’il est difficile de penser les choses en systémie, liées les unes aux autres, avec des conséquences si souvent transversales ! Il en est aussi parfois – souvent ? – de même dans nos relations. Avec untel ou tel autre : on l’apprécie, ou pas. Il est soit comme ci, soit comme ça. Pas de place au mystère de l’humain, à ses allers et retours, à sa recherche, à sa complexité, à une évolution possible. Et le piège se referme sur nous. Nous entrons dans un camp, et les autres dans le leur. Chacun dans sa case, pour que les choses soient simples.

Alors, faut-il payer l’impôt, oui ou non ?

            La réponse de Jésus nous apprend à sortir des pièges dans lesquels on nous enferme ou dans lesquels nous nous enfermons tout seul. Non pas parce qu’il est plus rusé que les autres, mais parce qu’il est le Vivant, et qu’il en épouse la liberté. Rien ni personne n’enferme la Vie, ne la prend au piège. La mort, même, en fera les frais : elle sera transpercée par la résurrection, et le tombeau, ouvert. La Bonne Nouvelle n’est pas à chercher dans telle ou telle bonne réponse à donner à telle ou telle situation, elle est dans la capacité que nous avons à être des vivants et à être libres de la liberté de Dieu. Parce que si la pièce d’argent a pour effigie César, nous portons, en nous, l’image de Dieu. L’image d’un Dieu qui ne se laisse jamais enfermer, dans aucune idée, aucun concept, aucun mot, aucune religion, aucune liturgie, aucune action, aucune recette. Il est le Dieu de la Vie, et d’une Vie qui déborde tout et tous, en accueillant et en assumant toutes les complexités de nos histoires et de l’histoire du monde.

            C’est l’expérience qu’a vécue le peuple Hébreux dans le livre d’Isaïe. Ce n’est pas à un juif que Dieu fait confiance, mais à Cyrus, un chef païen, un étranger, pour libérer les juifs et les laisser repartir à Jérusalem reconstruire le temple. Et c’est à ce signe, certainement dérangeant à bien des égards pour ceux qui trouveront ce choix étrange, que l’on saura « de l’Orient à l’Occident, qu’il n’y a rien en dehors du Seigneur, et qu’il n’en est pas d’autre. » Dieu ne se laisse pas enfermer dans les pièges. Avec lui, « aucune porte ne restera fermée. » Expérience résurrectionnelle.

            La vie dans le Christ, reçue à notre baptême, nourrie de la Parole de Dieu, à l’écoute de son Esprit, enracinée dans l’Evangile, devrait nous empêcher de tomber dans les pièges trop faciles du « tout ou rien », d’une pensée et d’un cœur binaires, et nous donner de vivre autrement dans le monde. Non pas en opposition, ni en suiveurs de tout, mais avec un regard, une présence, une action, une liberté qui font un pas de côté et qui ouvrent à une espérance, une autre perspective, un horizon.

            Notre prière continue d’accompagner les délégués de la session synodale à Rome. Elle accompagne également les membres des paroisses et des diocèses de France qui participent au rassemblement Kerygma, à Lourdes de week-end. Deux lieux où l’on cherche, précisément, à ouvrir les yeux et les oreilles sur les complexités du monde et de l’Homme d’aujourd’hui, pour découvrir à nouveaux frais où l’Eglise est attendue, et de quelle façon. Et se réjouir de la force de l’Evangile qui n’est pas « simple parole, mais puissance, action de l’Esprit Saint, pleine certitude », dit Saint Paul.

            Avec les mots de l’apôtre, nous portons notre prière au Seigneur. Non seulement pour que nous ne tombions pas dans les pièges et que nous n’en tendions pas à ceux qui nous entourent, mais pour que notre « foi soit active, que notre charité se donne de la peine, que notre espérance tienne bon en Jésus-Christ. » Et que nous prenions toute notre place de baptisés en ce monde, de disciples du Christ, pétris de la vie du Maître, prophètes du Royaume de Dieu.

            Amen.

P. Benoît Lecomte

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Une réponse sur « Homélie du 22 octobre 2023, par le P. Benoît Lecomte »

Barillot dit :

Heureusement qu’il y a internet car je n’ai entendu que le tiers de votre homélie,je peux ainsi méditer et entendre dans mon coeur cet appel à la vérité avec toute sa complexité.
Dieu est là , qu’il guide mon coeur et mes pas dans le quotidien au milieu de mes frères.

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