Homélie du 27 octobre 2024, par le P. Benoît Lecomte

Aubeterre - Chalais - Brossac

Publié le 27 octobre 2024

Il y a 15 jours, au cours de notre « messe de rentrée », nous avons présenté et découvert notre « Projet Pastoral de paroisse ». Nous voyons (il est toujours visible dans l’église) qu’il s’articule autour de 2 grands axes : « Adopter une démarche catéchuménale » et « A l’écoute du monde rural ». Si le 2ème axe parait assez simple à comprendre, le 1er mérite que l’on s’y attarde un peu. Que veut dire « adopter une démarche catéchuménale » dans les domaines de la prière, de l’annonce de la Parole de Dieu et de la solidarité ? Il me semble que la page d’Evangile que nous venons d’entendre peut nous aider.

Un aveugle mendie, au bord du chemin, à la sortie de la ville. La foule qui accompagne Jésus passe, l’aveugle comprend que Jésus n’est pas loin, et il l’appelle dans un acte, déjà, de foi : « Fils de David, Jésus, prends pitié de moi ! »

Et voilà que cet aveugle mendie… pas seulement quelques sous pour manger ou se loger, mais mendie une rencontre avec Jésus. Il est poussé vers cet homme dont il a certainement entendu parler mais qu’il ne connait pas encore. Avec l’aveugle, viennent à nos yeux les visages de tant et tant de personnes qui frappent à la porte de l’Eglise, de notre paroisse par un coup de téléphone, un mail, une rencontre avec l’un ou l’autre d’entre nous, et qui veulent rencontrer Jésus sans trop le connaître : les familles touchées par un deuil, les enfants et leurs parents, les catéchumènes bien sûr, ceux qui demandent le baptême de leur tout-petit ou un mariage, telle personne qui demande une visite au nom de notre foi… et peut-être aussi nous-mêmes, sommes-nous parfois mendiants de Jésus ! Nous comprenons déjà que la « démarche catéchuménale » n’est pas réservée aux quelques adultes demandant le baptême, mais à tous ceux qui cherchent à rencontrer Jésus.

Les personnes demandent. Bartimée demande. Et que se passe-t-il ? La foule le rabroue et lui demande de se taire. Nous pouvons voir dans la foule, les disciples de Jésus, ceux qui le suivent… et donc l’image de notre communauté chrétienne, de notre Eglise. Alors combien sommes-nous à plaindre ! Comment ne pas reconnaître que nous préférons parfois rester entre nous plutôt que de nous laisser déranger par ces demandes qui n’arrivent jamais au bon moment. Parce que nous n’avons pas le temps, pas la structure, pas les personnes pour répondre, que nous croyons ne pas savoir… et que nous choisissons de nous enfermer entre nous. Mais c’est sans compter sur la ténacité de ceux qui crient, sur l’Esprit qui les poussent déjà intérieurement. Sur l’ouverture de Jésus et son attention à chacun. Invitation pour notre paroisse à entrer dans cette attitude d’écoute et de compassion, pour transmettre l’appel de Jésus : « Confiance, lève-toi, il t’appelle. »

La foule – l’Eglise – amène alors le mendiant toujours aveugle à Jésus, et la rencontre peut avoir lieu. Elle est le secret de chacun avec Dieu, dans un dialogue mystérieux : « Que veux-tu que je fasse pour toi ? – Rabbouni, que je retrouve la vue ! – Va, ta foi ta sauvée. » Question de foi. Il ne s’agit pas tant de quitter la cécité physique que de voir le Christ avec les yeux de la foi, et avec Lui, le monde, et l’Homme. Bartimée ne vit pas seulement un miracle ophtalmologique, il est plongé dans un baptême qui le fait désormais vivre dans la lumière de Jésus-Christ. Et on le voit alors suivre Jésus sur le chemin, et donc suivre Jésus en compagnie de la foule, cette « foule – Eglise » qui après un premier temps de fermeture, a su l’accueillir et lui faire une place en son sein.

Voilà ce qu’est une démarche catéchuménale. Elle est plus qu’un processus, elle est une dynamique qui prend en compte une demande de foi encore balbutiante, pour l’accompagner vers une vie en Eglise dans le compagnonnage de Jésus reconnu et confessé comme Christ. Voilà l’élan auquel nous invite notre projet pastoral de paroisse, à vivre dans toutes les réalités que nous rencontrons et que nous traversons.

Cette posture doit ouvrir notre regard, nos oreilles, notre intelligence, dilater notre cœur, nous motiver pour vivre une mission joyeuse et toujours inattendue. Elle doit aussi nous mettre en état de profonde conversion. Dans l’évangile, la première personne à faire un acte de foi, étonnement, est Bartimée, celui-là même qui demande à rencontrer Jésus et à voir. Et la « foule – Eglise », qui croit connaître Jésus, doit se laisser surprendre par l’appel du Maître. Il peut en être de même dans nos rencontres pastorales, sur ce chemin catéchuménal. Si nous désirons aider les « demandeurs » (ou les mendiants, ou les chercheurs) à avancer, ce sont souvent eux, les premiers, qui font un acte de foi et viennent déranger nos habitudes, nos certitudes et notre propre foi trop installée. Le chemin catéchuménal devient alors ce compagnonnage réciproque, où l’on apprend les uns des autres à répondre ensemble à l’appel du Seigneur et à faire Eglise sur le même chemin. Point de supériorité, d’arrogance ou de savoir mal placé : c’est la fraternité et l’expérience spirituelle que chacun fait de Dieu, qui nous donnent de Le rencontrer et d’apprendre ensemble à vivre de Lui comme enfants du Père.

Vous pourrez reprendre le tableau du projet pastoral de paroisse. Il indique bien des lieux (évoqués lors de nos assemblées diverses) où vivre cette démarche d’initiation permanente. A nous maintenant, à chacun, de s’engager dans cette démarche, au service de notre communauté, de toute l’Eglise, et de nos contemporains.

Amen.                                                                                   

P. Benoît Lecomte

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