Homélie du 9 juin 2024, par le P. Benoît Lecomte

Aubeterre - Chalais - Brossac

Publié le 9 juin 2024

(Baptêmes de Raphaël et Jeanne, 1ères communions de Raphaël, Jeanne, Hugo et Anna)

D’où vient le mal ? D’où vient le scandale du mal qui semble ronger notre monde et parfois nos cœurs ? Et comment s’en défaire ? De tous temps, l’homme a cherché une réponse à ces questions. C’est ce que se demandent les scribes dans l’évangile, en soupçonnant Jésus d’expulser les démons « par le chef des démons. » C’est aussi la raison de l’écriture de ce passage de la Genèse, si connu de tous. L’auteur met en scène l’homme, la femme et le serpent. L’homme et la femme ont été créés par Dieu, et ils ont été créés bon, « et même très bon », dit l’Ecriture. Ils ont été créés « à l’image et à la ressemblance de Dieu. » Rien dans leur cœur ne s’oppose à l’Alliance que Dieu veut vivre avec l’Homme, homme et femme. Et nous comprenons encore, à la lecture de ce récit, que le mal n’est ni en l’homme, ni en la femme, mais bien extérieurs à eux. Le mal est introduit par le serpent, qui vient embrouiller l’homme et la femme en les mettant en concurrence avec Dieu lui-même. Il introduit la jalousie (vis-à-vis de Dieu), la méfiance, la délation, l’accusation, la honte… Tout ce qui va conduire le cœur des hommes vers le mal. Le cœur de l’Homme était bon, mais le mal, le malin, le sournois y est entré et l’a conduit vers ce qu’on appelle le péché, et la mort.

Jésus ne cherche pas l’origine du mal. Il le chasse. On le voit dans l’évangile chasser les démons, libérer les hommes et les femmes enfermés sur eux-mêmes, prisonniers du mal. Il vient chasser tous les démons, tous ceux qui nous assaillent (et chacun reconnaîtra les siens). Il ne vient pas les chasser en faisant un pacte avec eux ou avec leur chef (c’est l’hypothèse des scribes qui connaissent la religion et la loi juive). Il vient les chasser dans ce qu’on appelle le Mystère de Pâques. Il vient les chasser en prenant le mal sur lui, sur la croix, en descendant à la mort, en laissant le mal dans la mort et en ressuscitant avec nous pour nous rendre libres et vivants. C’est ce qu’évoque Saint Paul dans sa Lettre : « Nous le savons, celui qui a ressuscité le Seigneur Jésus nous ressuscitera, nous aussi, avec Jésus, et il nous placera près de lui… c’est pourquoi nous ne perdons pas courage, et même si en nous l’homme extérieur va à sa ruine, l’homme intérieur se renouvelle de jour en jour. »

Ce que Saint Paul écrit ici au futur, il l’écrit au présent ou au passé dans d’autres passages. Car cette victoire du Christ sur le mal et la mort n’est pas seulement notre futur. Elle est un présent, et même un passé parce qu’il l’a réalisée. Plus encore elle se réalise en nous par notre baptême. Cet événement est un événement de notre présent. Pour que le mal qui nous assaille et qui assaille le monde, disparaisse, soit englouti dans la mort, et que nous soyons pleinement vivants, déjà ressuscités avec le Christ Jésus.

C’est cet événement que vous vivez ce matin, Jeanne et Raphaël. Bien que vous ne soyez encore qu’enfant et que nous ne connaissiez peut-être pas le mal autant que nous, vous allez être plongés dans cette victoire du Christ qui nous libère – et vous libère – de tous les démons, de tout péché, de toute mort. Avec votre baptême, vous voilà pleinement vivants de l’Amour de Dieu en vous. Comme le disait encore Saint Paul : « Notre regard ne s’attache pas à ce qui se voit, mais à ce qui ne se voit pas ; ce qui se voit est provisoire, mais ce qui ne se voit pas est éternel. »

C’est ce que Jésus appelle encore dans l’évangile « le pardon », car le pardon est expérience même de cette résurrection : « Tout sera pardonné aux enfants des hommes ». Sauf, ajoute-t-il, si le cœur de l’homme lui-même est fermé à ce pardon, à cette vie, à cet amour, car la victoire du Christ ne s’impose jamais au cœur de l’homme qui reste libre de l’accueillir ou non.

Accueillir cette libération en nos vies nous transforme de l’intérieur et fait de nous des frères et des sœurs de Jésus, qui cherchent à faire la volonté de Dieu, qui désirent avant tout vivre dans l’amour, la paix et la fraternité. Elle fait de nous une seule et même famille, enfants de Dieu, répandant dans le monde cette Bonne Nouvelle : le mal n’a pas et n’aura pas le dernier mot. Et l’eucharistie est cette nourriture de chaque jour – ou de chaque dimanche – qui nourrit et entretien cette force divine en nous, nous liant intimement à Dieu et aussi les uns avec les autres, dans une réelle communion. Ce Corps du Christ, auquel Raphaël, Jeanne, Hugo et Anna vous allez communier, vous lie plus intimement à Jésus, à tout le genre humain, et à toute l’Eglise, qui devient le Corps du Christ ressuscité pour aujourd’hui, avec mission de répandre la Bonne Nouvelle, d’offrir le pardon et de chasser les démons de ce temps, au nom de Jésus.

Que la célébration de ces baptêmes et de cette eucharistie ravive en nous cette victoire et renouvellent notre désir d’en vivre pleinement et d’en témoigner autour de nous.

Amen.

P. Benoît Lecomte

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