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Visitation sur Boëme

Publié le 19 février 2023

Dimanche dernier, Jésus se présentait à nous comme le nouveau maître qui a autorité et que nous devons désormais écouter. Une expression était revenue de nombreuses fois dans l’Evangile : « Il vous a été dit … Et moi je vous dis. » La même expression revient par deux fois dans l’évangile de ce jour, avec une finale qui indique bien la mission de Jésus auprès de nous. Cette mission est de révéler le cœur du Père, et de nous conduire à agir comme lui : « Vous donc, vous serez parfaits comme votre Père céleste est parfait. »

            En effet, Jésus nous invite à regarder vers la sainteté de Dieu, pour bâtir notre propre sainteté. Il nous parle du cœur plein de bonté de Dieu, qui ne fait pas de différence entre les hommes : « il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, il fait tomber la pluie sur les justes et sur les injustes. » Le psaume 102 de ce jour a aussi magnifié le cœur de notre Dieu.Le psalmiste reconnait les bienfaits de Dieu dans sa vie. Dieu est celui-là qui te pardonne toutes tes offenses, c’est lui qui te guérit de toute maladie, il réclame ta vie à la tombe et te couronne d’amour et de tendresse. Le Seigneur est tendresse et pitié, lent à la colère et plein d’amour ; il n’agit pas envers nous selon nos fautes, ne nous rend pas selon nos offenses. Il présente Dieu comme un bon Père.

Ces qualités de Dieu, si on peut dire, voilà ce que Jésus nous demande d’imiter. C’est un appel à lever les yeux vers le Père, et à nous détourner de la sagesse du monde que saint Paul qualifie de folie devant Dieu. La sagesse du monde est faite de haine, de vengeance, de rancune, d’injustice et surtout de violence. Du temps de Moïse, les gens exagéraient dans la pratique de la justice. Si on crevait l’œil de quelqu’un, il cherchait à enlever les deux yeux, et même la mâchoire. Moïse en disant « œil pour œil, dent pour dent, » voulait déjà améliorer cette justice afin qu’elle soit proportionnelle. Avec le Christ qui vient parfaire la loi, il nous demande de faire un peu plus, afin d’être vraiment les fils de notre Père qui est aux cieux.

Si nous agissons comme les gens du monde, nous n’avons aucun mérite. Le Christ nous demande d’opposer à la haine l’amour, à la rancune et à la vengeance le pardon, à l’injustice la justice, à la méchanceté la bienveillance, à la violence la non-violence. Telle est le programme de notre vie chrétienne que le Seigneur nous propose ce dimanche. Il y a des raisons plus légitimes à l’accomplir : D’abord, les bienfaits de Dieu pour nous attendent la réciproque auprès du prochain. Ensuite, nous avons déjà été pardonnés par le Seigneur, et notre pardon doit aussi être donné. Enfin, Saint Paul nous a dit que nous sommes le sanctuaire de Dieu. A ce titre, nous devons nous efforcer de vivre dans la sainteté, comme Dieu.

Mais il ne faut pas se faire illusion. Ce n’est pas facile d’agir comme Dieu.  Nous avons une tendance naturelle à haïr nos ennemis, à chercher à nous venger, à garder de la rancune, et même à supprimer de notre vie, les personnes que nous ne voulons plus voir. Au fait, nous tombons chaque fois dans le piège de ce que Réné Girard appelle la violence mimétique. Nous imitons l’autre dans sa violence et personne ne veut céder.

Le Christ nous propose un autre chemin, celui de l’amour vrai et sincère. C’est le chemin qu’il a lui-même emprunter. Il est cette brebis qu’on a mené à l’abattoir de la croix, et qui n’a rien dit, alors qu’une seule parole a renversé tous les soldats au jardin des Oliviers. Il a accepté de tout pardonner alors qu’il était encore sur la croix.

C’est le chemin de sainteté qu’il nous trace. Pour être saint, il faut croire que cela est possible.  Ce n’est pas « l’idée des fakirs et des moines », comme il ressort des mains sales de Jean Paul Sartre. Il faut aussi le désirer, en prenant tous les moyens. Enfin, il faudrait surtout demander cette grâce à Dieu, comme la petite Thérèse de l’Enfant Jésus qui priait Jésus de l’élever vers la perfection, parce que consciente de ces limites :

 « Moi, je voudrais trouver un ascenseur pour m’élever jusqu’à Jésus, car je suis trop petite pour monter le rude escalier de la perfection …   L’ascenseur qui doit m’élever jusqu’au ciel, ce sont vos Bras, ô Jésus ! Pour cela, je n’ai pas besoin de grandir, au contraire, il faut que je reste petite, que je le devienne de plus en plus. Ô mon Dieu, Vous avez dépassé mon attente ! Je veux « chanter vos Miséricordes » ! (Psaumes 88, 2). Ainsi soit-il. »

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