Le divorce
UN SEISME QUI demande à être consolé
“ Quand la souffrance qui m’habitait était si crue, je pensais impossible d’être un jour à nouveau habitée par la paix.”
Si le divorce peut être un choc ou une libération, il est vécu pour la plupart comme un séisme. Il verrouille le cœur et ferme l’horizon.
“Je peux partager mes questions, mes peurs et mes doutes. Je peux évoquer l’estomac qui se retourne et le cœur qui vrille. Mais la souffrance, celle qui déchire l’âme, ne se raconte pas. Pas même à celui qui connait l’épreuve”.
La grande souffrance nous confronte à ce que nous sommes au plus profond de nous-mêmes.
On dit qu’en amour le premier pas est le plus difficile. Il donne le ton de la relation.
Il en va de même en matière de consolation.
Sur le chemin de l’épreuve, certains pas sont compliqués. D’autres pas sont salutaires : ceux qui nous ont épaulés, supportés, consolés. La consolation est une relation, un cœur à cœur qui expose dans sa vulnérabilité autant celui qui pleure que celui qui console.
Ce qui est révoltant, c’est une souffrance qui n’est pas consolée. Il suffirait d’une caresse, une parole, un sourire. Un simple sourire. Un tout petit rien à la portée de chacun, pour chasser ce sentiment de solitude. Un geste, pour éviter que la souffrance ne s’alourdisse du poids insupportable de l’isolement. Chacun peut agir sur la douleur de l’autre. Cela suppose que l’on s’implique, que l’on fasse un pas. Un petit pas, mais qui, pour beaucoup d’entre nous, est trop grand, peut-être même infranchissables.
Certains extraits sont tirés du livre “Consolation” – Anne Dauphine Julliand , Anne-Dauphine Julliand est la maman de quatre enfants, dont deux sont décédés d’une maladie neurodégénérative. J…
Voici une conférence de l’auteur : Conférence OCH – “Consoler, être consolé” avec Anne-Dauphine Julliand — KTOTV
Des questions pour préparer notre rencontre
- Aux pires moments que vous avez vécus, avez-vous ressenti un besoin de consolation ?
- Avez-vous l’impression d’avoir reçu une consolation de la part de quelqu’un ?
- Comment mon expérience m’aide à consoler les autres ?
Avant la rencontre, arrêtez-vous sur la 2ème lettre de Saint Paul aux Corinthiens (1, 1-17)
Elle sera notre support pour approfondir notre échange (noter ce que je comprends, ce que je découvre ou re-découvre ; ce qui me questionne, résiste ou que j’aimerais mieux comprendre ; ce qui rejoint mon expérience.
“PAUL, APOTRE du Christ Jésus par la volonté de Dieu, et Timothée notre frère, à l’Église de Dieu qui est à Corinthe, ainsi qu’à tous les fidèles qui sont par toute la Grèce. À vous, la grâce et la paix de la part de Dieu notre Père et du Seigneur Jésus Christ. Béni soit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus Christ, le Père plein de tendresse, le Dieu de qui vient tout réconfort.
Dans toutes nos détresses, il nous réconforte ; ainsi, nous pouvons réconforter tous ceux qui sont dans la détresse, grâce au réconfort que nous recevons nous-mêmes de Dieu. En effet, de même que nous avons largement part aux souffrances du Christ, de même, par le Christ, nous sommes largement réconfortés.
Quand nous sommes dans la détresse, c’est pour que vous obteniez le réconfort et le salut ; quand nous sommes réconfortés, c’est encore pour que vous obteniez le réconfort, et cela vous permet de supporter avec persévérance les mêmes souffrances que nous. En ce qui vous concerne, nous avons de solides raisons d’espérer, car, nous le savons, de même que vous avez part aux souffrances, de même vous obtiendrez le réconfort.”
➢ Pour aller plus loin
La « petite espérance » Charles Péguy
Ce qui m’étonne, dit Dieu, c’est l’espérance. Et je n’en reviens pas. Cette petite espérance qui n’a l’air de rien du tout. Cette petite fille espérance. Immortelle.
Car mes trois vertus, dit Dieu. Les trois vertus mes créatures, Mes filles mes enfants, Sont elles-mêmes comme mes autres créatures. De la race des hommes. La Foi est une Epouse fidèle. La Charité est une Mère. Une mère ardente, pleine de cœur. Ou une sœur aînée qui est comme une mère. L’Espérance est une petite fille de rien du tout. Qui est venue au monde le jour de Noël de l’année dernière. Qui joue encore avec le bonhomme Janvier.
Mais l’espérance ne va pas de soi. L’espérance ne va pas toute seule. Pour espérer, mon enfant, il faut être bien heureux, il faut avoir obtenu, reçu une grande grâce.[…]
La petite espérance s’avance entre ses deux grandes sœurs et on ne prend pas seulement garde à elle. Sur le chemin du salut, sur le chemin charnel, sur le chemin raboteux du salut, sur la route interminable, sur la route entre ses deux sœurs la petite espérance s’avance.
Entre ses deux grandes sœurs. Celle qui est mariée. Et celle qui est mère. Et l’on n’a d’attention, le peuple chrétien n’a d’attention que pour les deux grandes sœurs. La première et la dernière. Qui vont au plus pressé. Au temps présent. À l’instant momentané qui passe.
Le peuple chrétien ne voit que les deux grandes sœurs, n’a de regard que pour les deux grandes sœurs. Celle qui est à droite et celle qui est à gauche. Et il ne voit quasiment pas celle qui est au milieu. La petite, celle qui va encore à l’école. Et qui marche. Perdue entre les jupes de ses sœurs. Et il croit volontiers que ce sont les deux grandes qui traînent la petite par la main. Au milieu. Entre les deux. Pour lui faire faire ce chemin raboteux du salut. Les aveugles qui ne voient pas au contraire. Que c’est elle au milieu qui entraîne ses grandes sœurs. Et que sans elle elles ne seraient rien. Que deux femmes déjà âgées. Deux femmes d’un certain âge. Fripées par la vie. C’est elle, cette petite, qui entraîne tout. Car la Foi ne voit que ce qui est. Et elle, elle voit ce qui sera. La Charité n’aime que ce qui est. Et elle, elle aime ce qui sera. La Foi voit ce qui est. Dans le Temps et dans l’Éternité. L’Espérance voit ce qui sera. Dans le temps et dans l’éternité. Pour ainsi dire le futur de l’éternité même. La Charité aime ce qui est. Dans le Temps et dans l’Éternité. Dieu et le prochain. Comme la Foi voit Dieu et la création. Mais l’Espérance aime ce qui sera. Dans le temps et dans l’éternité. Pour ainsi dire dans le futur de l’éternité. L’Espérance voit ce qui n’est pas encore et qui sera. Elle aime ce qui n’est pas encore et qui sera Dans le futur du temps et de l’éternité. Sur le chemin montant, sablonneux, malaisé. Sur la route montante. Traînée, pendue aux bras de ses deux grandes sœurs, Qui la tiennent par la main, La petite espérance S’avance. Et au milieu entre ses deux grandes sœurs elle a l’air de se laisser traîner. Comme une enfant qui n’aurait pas la force de marcher. Et qu’on traînerait sur cette route malgré elle.
Et en réalité c’est elle qui fait marcher les deux autres. Et qui les traîne. Et qui fait marcher tout le monde. Et qui le traîne. Car on ne travaille jamais que pour les enfants. Et les deux grandes ne marchent que pour la petite.
Charles Péguy, Le Porche du mystère de la deuxième vertu, 1912.