Soif d’Amélie Nothomb

Notre Dame des Terres en Haute-Charente

Amélie Nothomb ose explorer, à la première personne, les états d’âme de Jésus au temps de sa passion. L’occasion d’une belle méditation sur ce que veut dire avoir un corps.

Nous reprenons ci-dessous l’article de Dominique Greiner paru le 23/8/2019 dans La Croix

• Soif, d’Amélie Nothomb, Albin Michel, 152 p.

D’aucuns trouveront prétentieux le nouveau livre d’Amélie Nothomb. Pour qui se prend la romancière, qui ose imaginer ce que fut le monologue intérieur de Jésus dans les heures de sa Passion ? D’autres lui reprocheront une trop grande liberté par rapport aux textes du Nouveau Testament, notamment quand elle évoque une relation amoureuse avec Marie Madeleine, ou fait dire à Jésus qu’il n’a jamais prononcé telle ou telle parole contenue dans les Écritures. Mais un roman n’est pas parole d’Évangile.

Dans ce livre au titre lapidaire, Amélie Nothomb offre une belle réflexion – une méditation ? – sur ce que signifie avoir un corps. Sans corps, on ne peut éprouver de sentiments, faire l’expérience de la soif ou de la mort. La romancière imagine ce qui traverse l’esprit de Jésus dans les dernières heures de sa vie, depuis son procès et jusqu’à son ensevelissement, et même après. Le temps de la Passion ravive la mémoire d’événements, d’expériences, de rencontres marquantes…

Le temps de la Passion est aussi celui de l’introspection
Le Jésus d’Amélie, qui se qualifie de « faux calme », vit avec intensité sa condition corporelle, jouissant de chaque moment, même les plus anodins : « Quand je m’allonge pour dormir, ce simple abandon me procure un plaisir si grand que je dois m’empêcher de gémir. Manger le plus humble brouet, boire de l’eau m’arracherait des soupirs de volupté si je n’y mettais pas bon ordre. » Ce qui fait dire à Jésus : « J’ai la conviction infalsifiable d’être le plus incarné des humains. »

L’épreuve de la Passion n’en sera que plus terrible : l’écoute des accusations – des miraculés ingrats qui se plaignent que les miracles dont ils ont bénéficié n’ont pas changé leur vie dans le sens attendu –, la peur du condamné à mort dans l’attente de son exécution, la couronne d’épines, la flagellation, le poids du bois sur les épaules, les chutes, les clous qui pénètrent la chair, la soif, la mort. « L’assoiffé est dans une telle présence que c’en est gênant. Nul besoin de gloser là-dessus. Mourir, c’est faire acte de présence par excellence. »Le temps de la Passion est aussi celui de l’introspection. Le regret lui vient d’avoir une fois dans sa vie « laissé (s) on désir se transformer en colère », en maudissant un figuier qui ne portait pas de figues dont il aurait aimé se rassasier. « J’ai prétexté une parabole, pas la plus convaincante. Comment ai-je pu commettre une injustice pareille ? Ce n’était pas la saison des figues. En vérité, ce jour-là, j’ai été commun. » Il se souvient aussi avec émotion des êtres chers (sa mère, Joseph, la si belle Marie de Magdala) – « avant l’Incarnation, j’ai peu de souvenirs ». Il pense à ses disciples avec une bienveillante lucidité sur les limites et les qualités de chacun. Pierre : « Je sais pourtant qu’il me reniera, mais il m’inspire une telle confiance. » Jean : « Je sais que l’écoute de Jean est amour et me bouleverse. » Judas : « Il aurait découragé n’importe qui, il m’a découragé plus d’une fois. L’aimer relevait de la gageure et je ne l’en aimais que plus. »

Une manière de parler de la foi
Mais ce Jésus si incarné n’est pas qu’un homme. Il est le fils de qui il tient sa condition charnelle. Et c’est vers celui qu’il appelle père que le crucifié adresse ses récriminations. Une plainte pathétique qui est aussi une preuve d’amour. « Cette crucifixion est une bévue. Le projet de mon père consistait à montrer jusqu’où on pouvait aller par amour. (…) Pourquoi fais-tu cela ? Je te critique. Ai-je dit que je ne t’aimais pas ? Je t’en veux, je suis fâché contre toi. L’amour autorise de tels sentiments. Que sais-tu de l’amour ? C’est bien là le problème. Tu ne connais pas l’amour. L’amour est une histoire, il faut un corps pour la raconter. » Et c’est ce corps souffrant qui parle, exprime ses doutes, réfléchit sur le sens du mot « croire », anticipe les douteuses interprétations de sa mort ignoble : « L’idée même d’une expiation répugne par son absurde sadisme. »

À travers les mots et les doutes qu’Amélie Nothomb imagine traverser la conscience de Jésus, c’est aussi une manière de parler de la foi qui est interrogée. Il faut un langage incarné pour parler de l’Incarnation. La romancière y excelle.

Partagez cette page à vos amis !




Télécharger au format PDF

Les chantiers de notre diocèse

Appel à dons pour aider des jeunes à partir à Rome pour le Jubilé 2025

Un projet pour aider nos jeunes à vivre leur foi ! Durant une année – dite Année sainte – de multiples démarches spirituelles sont organisées et proposées aux fidèles : pèlerinages à Rome, passages de Portes saintes, enseignements… Autant de propositions qui encouragent à prendre soin de sa vie intérieure et redécouvrir son lien au Christ.  […]
En savoir plus
0 € financés sur un objectif de 10 000 €

Soutenons l’accueil de nos prêtres à Confolens : un projet pour des logements adaptés

C’est le 9 juin 2023 que Monseigneur GOSSELIN demande au Père FERNANDEZ d’aménager des logements pour deux ou trois prêtres dans la Maison Paroissiale de Confolens. Le presbytère de Confolens n’étant pas adapté pour accueillir 3 prêtres toute l’année et les prêtres qui viennent l’été. Un projet prend rapidement forme et dans les anciennes écuries […]
En savoir plus
0 € financés sur un objectif de 145 000 €

Appel à dons pour le remplacement des chaises de l’Église Saint Paul

Un projet pour le confort et l’accueil dans notre église Depuis plus de 40 ans, les chaises en plastique de l’église Saint Paul ont accueilli des milliers de fidèles et de visiteurs lors des célébrations et événements culturels. Malheureusement, le temps et l’usage ont laissé des traces : la plupart de ces chaises sont aujourd’hui […]
En savoir plus
870 € financés sur un objectif de 4 954 €

Abbaye de Bassac : soutenons les travaux d’aménagement de l’aile ouest

L’Abbaye de Bassac, lieu emblématique de paix et de spiritualité, fait appel à votre soutien pour un projet d’envergure. Les deux étages de l’aile ouest des bâtiments nécessitent d’importants aménagements afin de pouvoir accueillir, dans les meilleures conditions, des groupes de jeunes, des familles, et toute personne en recherche d’un espace de tranquillité. Objectif de […]
En savoir plus
4 604 € financés sur un objectif de 480 000 €

Appel à dons pour la rénovation de l’éclairage de l’église Saint-Antoine

Chers amis, L’église Saint-Antoine, témoin de notre histoire et lieu de recueillement, mérite d’être mise en lumière pour continuer d’accueillir les fidèles et les visiteurs dans un cadre chaleureux et sécurisé. Aujourd’hui, nous faisons appel à votre générosité pour soutenir un projet important : le réaménagement de son éclairage. Afin de mettre en valeur l’architecture […]
En savoir plus
375 € financés sur un objectif de 5 895 €

Soutenons ensemble la rénovation de la façade de la Maison Diocésaine !

Dès l’automne prochain, notre Maison diocésaine devrait commencer à faire peau neuve. La Maison diocésaine est au centre et au service de l’Église en Charente : elle héberge tous les services diocésains, certains mouvementset des associations qui comptent dans le paysage charentais : RCF Charente, BD Chrétienne, etc… Elle profite d’une situation géographique exceptionnelle, au […]
En savoir plus
158 500 € financés sur un objectif de 162 000 €

Je recherche