Ce vendredi 21 novembre 2025, le diocèse d’Angoulême a été invité aux Archives départementales de la Charente, à Angoulême, pour la restitution de la numérisation du cartulaire de Baignes, un manuscrit exceptionnel du Moyen Âge conservé depuis plus d’un siècle dans les collections diocésaines.
Cette rencontre a permis de mettre en lumière non seulement la valeur patrimoniale unique du document, mais aussi tout le travail mené par les archivistes pour en préserver l’intégrité et en permettre l’accès au plus grand nombre.
Un manuscrit rare, témoin de l’histoire du Sud-Charente
Copié au XIIIᵉ siècle, le cartulaire de Baignes rassemble 106 feuillets et près de 550 chartes et notices retraçant la vie de l’abbaye bénédictine Saint-Étienne : donations de terres, délimitations de propriétés, droits féodaux, confirmations épiscopales ou encore récits internes à la communauté monastique.
Il s’agit d’un manuscrit d’une grande qualité :
- écriture régulière,
- mise en page soignée,
- belles majuscules,
- huit lettrines enluminées, un fait exceptionnel dans les cartulaires d’Aquitaine.
Les archivistes départementaux l’ont souligné, parmi les cartulaires médiévaux conservés en Charente (Saint-Cybard, Saint-Amant-de-Boixe, évêché d’Angoulême…) : « C’est clairement le plus beau et le plus significatif du point de vue de son décor ».
Un parcours mouvementé
Le cartulaire a connu une histoire singulière.
Déjà considéré comme perdu au XVIᵉ siècle, il avait quitté l’abbaye bien avant la Révolution française. S’il y avait été conservé, il aurait été saisi comme les autres biens ecclésiastiques et intégré au fonds public.
Il réapparaît finalement au XIXᵉ siècle, chez un antiquaire de Saintes.
C’est Mgr Cousseau, évêque d’Angoulême et passionné d’histoire, qui décide de l’acheter, conscient de son importance pour l’histoire religieuse régionale.
Le manuscrit rejoint ensuite la bibliothèque épiscopale puis celle du Grand Séminaire, avant d’être conservé jusqu’à aujourd’hui par le diocèse.
Son état remarquable laisse supposer qu’il fut longtemps préservé dans une bibliothèque privée.
Définition : qu’est-ce qu’un cartulaire ?
Le mot cartulaire provient du latin classique charta, qui signifie « papier ».
En latin médiéval, chartularium désigne un « recueil d’actes ».
Un cartulaire est donc un recueil de copies de chartes, dans lesquelles sont répertoriés :
- les titres de propriété,
- les ventes,
- les donations de terres,
- les droits, usages et privilèges accordés par des seigneurs.
« C’est un peu l’équivalent d’un dossier de correspondance officielle : on recopie les actes reçus pour garder une trace juridique et administrative pour une abbaye, un chapitre, un évêque ou un seigneur » a expliqué Madame Marion Bernard, Directrice des archives départementales de la Charente.
Le rôle du cartulaire de Baignes
Le cartulaire de Baignes illustre parfaitement cette fonction.
La première notice évoque par exemple le conflit interne du XIIᵉ siècle entre moines favorables à un rattachement à Cluny et ceux souhaitant préserver l’autonomie locale.
L’évêque Gérard d’Angoulême y intervient, décrit comme hésitant face à la puissance clunisienne.
Ces notices et chartes forment un témoignage rare de la vie ecclésiale, politique et sociale du Sud-Charente médiéval.
Numériser pour préserver et transmettre
Pour garantir la préservation du manuscrit tout en le rendant accessible, le diocèse d’Angoulême a confié aux Archives départementales la mission de numériser intégralement les 106 feuillets du cartulaire.
Cette numérisation représente :
- un geste de conservation, puisque le document n’a plus besoin d’être manipulé ;
- un outil de diffusion, chaque page devenant consultable en ligne ;
- une nouvelle ressource scientifique, ouvrant la voie à des recherches historiques, linguistiques et patrimoniales.
La numérisation s’accompagne également d’un projet plus large : la restauration des trois grands cartulaires médiévaux charentais par l’atelier de Nadine Dumain, spécialiste reconnue de la reliure et de la conservation au Moulin du Verger à Puymoyen.
Un patrimoine bientôt accessible à tous
Grâce à la numérisation, chacun pourra prochainement consulter en ligne ce manuscrit unique : chercheurs, enseignants, étudiants, passionnés d’histoire ou simples curieux du patrimoine charentais.
Le diocèse d’Angoulême se réjouit de cette étape majeure, qui permettra de transmettre ce trésor et de renforcer la connaissance de l’histoire religieuse du territoire.
Remerciements
Le diocèse d’Angoulême adresse ses remerciements chaleureux aux Archives départementales de la Charente, pour leur accueil et leur travail minutieux, et particulièrement à Marion Bernard, M. Ménard et Nicolas Camau, dont l’expertise a permis la réussite de cette numérisation.
Grâce à ce partenariat fécond, le cartulaire de l’abbaye de Baignes entre dans une nouvelle vie, désormais à portée de clic.












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