Laudato Si’ : du texte aux actes

ActualitésEglise verte

Publié le 14 octobre 2024

« Tradition et filiation. Antécédents de l’encyclique Laudato Si’ »
Chronique RCF Charente du 7 octobre 2024

Rerum novarum (1891) § 7

« Qu’on n’oppose pas non plus à la légitimité de la propriété privée le fait que Dieu a donné la terre au genre humain tout entier pour qu’il l’utilise et en jouisse. Si l’on dit que Dieu l’a donnée en commun aux hommes, cela signifie non pas qu’ils doivent la posséder confusément, mais que Dieu n’a assigné de part à aucun homme en particulier. Il a abandonné la délimitation des propriétés à la sagesse des hommes et aux institutions des peuples. »

Quadragesimo anno (1931) § 45

« C’est de la nature et donc du Créateur que les hommes ont reçu le droit de la propriété privée, tout à la fois pour que chacun puisse pourvoir à sa subsistance et à celle des siens, et pour que, grâce à cette institution, les biens mis par le Créateur à la disposition de l’humanité remplissent effectivement leur destination : ce qui ne peut être réalisé que par le maintien d’un ordre certain et bien réglé. »

Laudato Si’ (2015) § 93

« Aujourd’hui croyants et non croyants, nous sommes d’accord sur le fait que la terre est essentiellement un héritage commun, dont les fruits doivent bénéficier à tous. Pour les croyants cela devient une question de fidélité au Créateur, puisque Dieu a créé le monde pour tous. Par conséquent, toute approche écologique doit incorporer une perspective sociale qui prenne en compte les droits fondamentaux des plus défavorisés. Le principe de subordination de la propriété privée à la destination universelle des biens et, par conséquent, le droit universel à leur usage, est une “règle d’or” du comportement social, et « le premier principe de tout l’ordre éthico-social »1. La tradition chrétienne n’a jamais reconnu comme absolu ou intouchable le droit à la propriété privée, et elle a souligné la fonction sociale de toute forme de propriété privée. Saint Jean-Paul II a rappelé avec beaucoup de force cette doctrine en affirmant que « Dieu a donné la terre à tout le genre humain pour qu’elle fasse vivre tous ses membres, sans exclure ni privilégier personne »2. Ce sont des paroles denses et fortes. Il a souligné qu’« un type de développement qui ne respecterait pas et n’encouragerait pas les droits humains, personnels et sociaux, économiques et politiques, y compris les droits des nations et des peuples, ne serait pas non plus digne de l’homme »3. Avec une grande clarté, il a expliqué que « l’Église défend, certes, le droit à la propriété privée, mais elle enseigne avec non moins de clarté que sur toute propriété pèse toujours une hypothèque sociale, pour que les biens servent à la destination générale que Dieu leur a donnée »4. Par conséquent, il a rappelé qu’« il n’est […] pas permis, parce que cela n’est pas conforme au dessein de Dieu, de gérer ce don d’une manière telle que tous ces bienfaits profitent seulement à quelques uns »5. Cela remet sérieusement en cause les habitudes injustes d’une partie de l’humanité »6.

1] Jean-Paul II, Lett. enc. Laborem exercens (14 septembre 1981), n. 19 : AAS 73 (1981), 626.
2] Lett. enc. Centesimus annus (1er mai 1991), n. 31 : AAS 83 (1991), 831.
3] Lett. enc. Sollicitudo rei socialis (30 décembre 1987), n. 33 : AAS 80 (1988), 557.
4] Discours aux indigènes et paysans du Mexique, Cuilapán (29 janvier 1979), n. 6 : AAS 71 (1979), 209.
5] Homélie de la messe pour les agriculteurs à Recife, Brésil (7 juillet 1980), n. 4 : AAS 72 (1980), 926.
6] Cf. Message pour la Journée Mondiale de la Paix 1990, n. 8 : AAS 82 (1990), 152.

Laudato Si’ (2015) § 2

« Cette sœur crie en raison des dégâts que nous lui causons par l’utilisation irresponsable et par l’abus des biens que Dieu a déposés en elle. Nous avons grandi en pensant que nous étions ses propriétaires et ses dominateurs, autorisés à l’exploiter. La violence qu’il y a dans le cœur humain blessé par le péché se manifeste aussi à travers les symptômes de maladie que nous observons dans le sol, dans l’eau, dans l’air et dans les êtres vivants. C’est pourquoi, parmi les pauvres les plus abandonnés et maltraités, se trouve notre terre opprimée et dévastée, qui « gémit en travail d’enfantement » (Rm 8, 22). Nous oublions que nous-mêmes, nous sommes poussière (cf. Gn 2, 7). Notre propre corps est constitué d’éléments de la planète, son air nous donne le souffle et son eau nous vivifie comme elle nous restaure. »

Laudato Si’ (2015) § 89

« Les créatures de ce monde ne peuvent pas être considérées comme un bien sans propriétaire : « Tout est à toi, Maître, ami de la vie » (Sg 11, 26). D’où la conviction que, créés par le même Père, nous et tous les êtres de l’univers, sommes unis par des liens invisibles, et formons une sorte de famille universelle, une communion sublime qui nous pousse à un respect sacré, tendre et humble. Je veux rappeler que « Dieu nous a unis si étroitement au monde qui nous entoure, que la désertification du sol est comme une maladie pour chacun et nous pouvons nous lamenter sur l’extinction d’une espèce comme si elle était une mutilation »1.

1] Exhort. apost. Evangelii gaudium (24 novembre 2013), n. 215 : AAS 105 (2013), 1109.

Sources

Rerum novarum.
Quadragesima anno.
Laudato Si’

– Ecrits de Fabien Revol, théologien et philosophe. Professeur à l’université catholique de Lyon, dirige la Chaire Hélène et Jean Bastaire, dédiée à la théologie de la création et à l’écologie. Centre Hélène et Jean Bastaire (à Berganty dans le Lot).

https://www.doctrine-sociale-catholique.fr/
https://www.vatican.va/content/vatican/fr.html

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